jeudi 5 mai 2016

Musée Guggenheim Bilbao : Louise Bourgeois, quand l'intime touche à l'universel

Attention! Nous allons pénétrer dans l'univers d'une plasticienne hors-nomes, avant-gardiste, et ce voyage s'avèrera dérangeant, déroutant, et très fort. Attachez vos ceintures et attendez vous à être secoués, dans le bon comme dans le mauvais sens du terme! Et nous alors, avons-nous aimé ou détesté?

©patricbeguinel

OUI ! Nous avons a-d-o-r-é cette expo ( 18 mars au 4 septembre 2016) de l'artiste française Louise Bourgeois au musée Guggenheim de Bilbao.

Un véritable coup de cœur, coup de boule, coup du lapin. Et comme tout coup de foudre qui se respecte, il ne souffre aucune nuance, il est déraisonnable, incompréhensible (bien qu'aisément explicable), car il touche à des zones secrètes de notre psyché.

Mais en quoi consiste exactement cette expo? Intitulée Structures De L'existence : Les Cellules, l'exposition met en lumière le travail de la plasticienne (1911-2010), à ne pas confondre avec l'ex-miss météo, désormais actrice (…), Louise Bourgoin dont le pseudonyme est une référence à la sculptrice, peintre, performeuse and so on...

Pourquoi ce nom « Cellules » ? Tout simplement parce que Bourgeois montait des scènes dans des espaces clos, plus ou moins ajourés, de plus ou moins grande taille/volume, dans lesquelles elle enfermait ses œuvres.

Grillages, portes d'usines métalliques, portes en bois, parois vitrées, ces cellules évoquaient la cellule au sens premier du terme (celle dont est issue toute vie, à savoir un noyau entouré d'une membrane) mais également, sous une certaine forme, l'univers carcéral, la prison qu'est notre esprit, la prison qu'est notre propre enveloppe charnelle.

Développant des thèmes qui lui sont chers (la mère, représentée sous forme d'une araignée protectrice, le père représenté sous forme de boule(s) évoquant très fortement des couilles, le corps ou des parties de celui-ci, très souvent des mains et des pieds, l'enfance...), Bourgeois allait très loin dans sa réflexion, poussant le spectateur jusqu'à l'orée du malaise. Avouons-le : elle nous fait même carrément flipper dans certains cas.

Pourquoi ? Parce que nous sommes voyeurs de son travail, nous lorgnons ses œuvres par le biais d'une fente dans une porte, d'un gond, par une fenêtre, par un jeu de miroir, et ce que nous épions, ce sont nos propres travers, nos propres vices, nos propres viscères.

Nous regardons les installations d'un œil avide, projetant notre regard dans sa vie à elle qui fait trop penser à notre vie à nous. Le plus édifiant est ce jeu de miroir qu'elle met en place et qui décortique une scène à travers divers angles, et nous sommes là, en train d'assister à un dissection, ou à une autopsie d'un corps démembré, à une psychologie tourmenté qui vole en éclat.

Bourgeois nous force à tirer sur les ficelles de notre imagination, de notre vécu, pour en tirer des conclusions qui ne seront, au final, que très personnelles, introspectives. Car en plus de déballer sa vie, elle étale la notre aux yeux de tous. Elle nous parle aussi de l'Humain avec un grand H, dévoilant ses peurs, ses craintes, mais aussi son amour, sa bienveillance.

Remuantes, bouleversantes, magnifiques autant que cruelles, arides, ces cellules, loin de nous enfermer, nous ouvre les portes d'une réflexion sur qui nous sommes, de qui sont nos voisins. Il ne tient dès lors qu'à nous de franchir les bons seuils pour devenir grand, pour devenir adulte.


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